Dossier Fin de mandat du président Jovenel Moïse | Mirlande Manigat | Opinion | RDNP | Élections
La constitutionnaliste Mirlande Manigat a pris le temps de donner son point de vue sur sur ce qu’il y a lieu de proposer et de faire sur le nouveau débat concernant la fin du mandat de l’actuel Président de la République Jovenel Moïse. Quand prendra fin le mandat du chef de l’Etat ? 7 février 2021 ou 7 février 2022 ?
Mirlande Manigat dit avoir longuement réfléchi avant d’opininer sur le sujet. Un sujet piégé selon elle. Car, « Se prononcer pour le 7 février 2022, équivaudrait à accorder un blanc-seing au pouvoir actuel et à une partie de la communauté internationale qui s’est prononcée. Choisir le 7 février 2021, signifierait que l’on se range du côté de l’opposition dite démocratique alliée à d’autres secteurs qui n’en font pas partie », pense la professeure d’université. Ce qui veut dire, laissé au pouvoir d’agir ou de décider à sa guise.
L’annulation d’un évènement n’affecte pas sa nature, sa réalité ni ses conséquences
« Pour rester dans le domaine de l’interprétation juridique, on peut se demander, poursuit Mirlande Manigat, que signifie la mention suivant la date des élections (Article 134-1) soit conformément à ou ce qui suit. Certes, le Droit a sa propre grammaire mais celle-ci doit être précise, dénuée d’ambigüité. D’une manière générale, la Constitution statue fondamentalement sur un évènement imparable, les élections, et ne tient absolument pas compte d’autres faits qui l’accompagnent en amont (la campagne électorale) et a posteriori à savoir la proclamation des résultats et l’installation du vainqueur qu’elle évoque par l’expression il entre en fonction le 7 février (Article 134-2, 2ème paragraphe). Enfin, la localisation de ce 7 février dans le calendrier annuel subit des contorsions par la mention est censé avoir commencé l’année de l’élection ».
Elle reprend le chronogramme des dernières années rappelant on que des élections, comme annoncées, se sont déroulées en 2015, puis elles ont été annulées à cause des dénonciations de fraude par tous les participants sauf ceux du parti au pouvoir. « Or, l’annulation d’un évènement n’affecte pas sa nature, sa réalité ni ses conséquences. En termes économiques, elle pourrait passer par profit et perte, deux effets opposés mais comptabilisés et conduire à une réévaluation des modalités » explique Mirlande Manigat.
Position exprimée par Mirlande Manigat
Selon la présidente d’honneur du RDNP, les élections ont été reprises en 2016. Il s’est agi d’une continuation et non de l’initiation d’une nouvelle donne. Entretemps, elle rappelle que l’Organisation des Etats Américains avait refusé de reconnaître cette annulation et annoncé qu’elle ne financerait pas de nouvelles élections.
« Le fait que le vainqueur n’a prêté serment que le 7 février 2017 n’introduit pas un décalage juridique avec les élections, sinon une inconvenance protocolaire. Juridiquement donc, conformément à la Constitution, le début du mandat de Jovenel Moïse a commencé le 7 février 2016 et se termine cinq ans plus tard, le 7 février 2021. Le temps constitutionnel s’impose donc pour identifier les élections; la prestation de serment aurait pu se faire n’importe quand et elle n’affecte pas le terme de l’occupation, qui est une donnée constitutionnelle, mais le début conjoncturel du mandat qui est de nature politique » argue Mirlande Manigat.
« Ainsi, le passage de la date fétiche du 7 février 2021 n’est pas un moment banal car elle est chargée de virtualités qui peuvent être prometteuses pour l’avenir ou encore tragiques. Il appartient aux citoyens soucieux de l’avenir du pays de se conditionner pour l’accueillir non avec des flambeaux encensoirs, mais avec le sérieux que réclame l’avenir de notre pays », conclut Mirlande Manigat, Constitutionnaliste, Professeure à l’Université Quisqueya et Présidente d’Honneur du RDNP.
Constant Haïti